LE LABORATOIRE DE RECHERCHE EN SCIENCES DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION DU CELSA
UR 1498

Motion du GRIPIC contre le projet de loi dit LPPR, AG du 15 janvier 2020

Les membres du GRIPIC (EA 1498) réunis en AG prennent collectivement position contre le projet de Loi de Programmation Pluriannuelle de la Recherche (LPPR). Les enseignant.e.s chercheur.e.s titulaires, les doctorant.e.s et jeunes chercheur.e.s ont une vision partagée du danger que représente la réforme. Celle-ci prolonge et aggrave très fortement la dégradation des conditions d’exercice dans l’enseignement et la recherche avec :

Le développement de recherches sur projets fléchés en fonction de priorités définies selon des logiques managériales destinées à décider à la place et au nom de toutes et tous de ce dont une société a besoin. Nous rappelons que l’histoire devrait nous inciter à la plus extrême prudence face aux prétentions à mettre la main sur le pilotage de la production des savoirs d’intérêt public notamment en SHS ;
Le renforcement de la logique productiviste alors que celle-ci ne garantit absolument pas la qualité des recherches, et dont on sait par ailleurs qu'elle doit être profondément revue pour faire face aux enjeux climatiques et socio-écologiques majeurs et à la préservation des liens sociaux et des biens communs ;
La mise en concurrence des établissements, des disciplines, des équipes, des personnes, et des institutions entre pays, alors même que nous savons à quel point celle-ci est désastreuse, réduit le partage et la coopération, accroit considérablement les risques de fraudes, et ouvre la porte à des dérives éthiques graves ;
L’accroissement de la pression exercée sur tou.te.s les travailleur.e.s de l'enseignement supérieur et de la recherche avec : l’alourdissement des charges administratives, l'incertitude d'être payé.e.s à l'heure, ou d'être payé.e.s tout court, l’alourdissement des charges d’enseignement, l’accroissement des inégalités entre collègues, les risques accrus de dépendance et de clientélisme, la négation du rôle des instances de régulation collégiales etc. ;
La précarisation des enseignant.e.s chercheur.e.s et notamment des plus vulnérables d'entre elles et eux, doctorant.e.s et étudiant.e.s qui choisissent de se consacrer à des études longues et difficiles et qui prennent au sérieux la qualité de la recherche et la dimension émancipatrice des savoirs. Le projet aggrave en effet les conditions de cette précarisation déjà durement ressentie : rareté des financements, réduction des temps de recherche, rareté des perspectives de postes eux-mêmes précarisés avec la proposition de CDI de projets ;
La dégradation des conditions de travail des personnels administratifs et techniques, la négation des interdépendances indispensables à la vie de l’enseignement supérieur et de la recherche et à son ancrage dans l’ensemble d’une société qui compte sur la production des savoirs et leur partage ;
La négation de tout le travail caché qui est essentiel dans les organisations de service public : bénévolat caché, dons multiples et continus de temps, de ressources, auto-financement, entraide, ouverture, travail gratuit, etc.  

Les enseignant.e.s-chercheur.e.s titulaires dénoncent également la faute morale grave à l’égard des plus jeunes. Ils et elles souhaitent leur garantir la transmission des institutions de service public (éducation, enseignement supérieur et recherche, santé, justice) au lieu de condamner les étudiant.e.s et la jeunesse à la précarité, à une compétition stérilisante au service d’autres intérêts que le bien commun.

Ils et elles sont conscients que l’ESR fait face à de nombreux problèmes, mais rappellent que la France reste un espace de recherche international rayonnant et accueillant, auquel les sciences sociales contribuent très largement, et qui doit être soutenu au lieu d’être sans cesse altéré. Ils et elles défendent une mission d’accompagnement, d’enseignement, de formation des jeunes dans l’ensemble du système éducatif, qui ne limite pas le rôle de nos institutions à des enjeux d’employabilité.

Les enseignant.e.s et les chercheur.e.s ont fait et continuent de faire de très nombreuses propositions pour faire évoluer l’enseignement et la recherche. Ils et elles regrettent le fait que cette réforme s’appuie sur des rapports qui ne tiennent pas compte de cette production continue de réflexion et d’expérimentation ni de la valeur et de la qualité de l’enseignement supérieur public dans la formation et l’accompagnement des étudiant.e.s.

Le GRIPIC décide collectivement de soutenir les actions collectives et individuelles de ses membres mobilisés pour le retrait de ce projet de loi, en particulier les plus exposés et les plus concernés. Il rejoint également la mobilisation actuelle de très nombreux laboratoires, UFR, établissements, sociétés savantes, et revues scientifiques. 

Il décide de :

Déléguer des membres aux assemblées réunissant les collectifs en lutte ;
Soutenir les actions visant à réorienter les activités de recherche vers la situation et le mouvement actuel ;
Soutenir la grève, notamment celle des activités multiples non reconnues des doctorant.e.s et enseignant.e.s-chercheur.e.s (évaluations, comités, etc.).
Rendre visible la mobilisation dans les interventions publiques, dans les manifestations, et dans les signatures électroniques.

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