LE LABORATOIRE DE RECHERCHE EN SCIENCES DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION DU CELSA
UR 1498
Communication sans actes

Des Afroféministes sur Youtube

Médiation des Savoirs et Circulation Numérique des Discours de Femmes Noires Militantes
Des féminismes noirs en contexte (post)impérial français? Histoires, expériences et théories, 03 mars 2020, Campus Condorcet, Centre des colloques, Auditorium 250, Place du Front populaire, Aubervilliers

L’expression politique et médiatique des femmes noires militantes en France est encore loin d’aller de soi tant la parité de participation à l’espace public n’est pas réalisée. Les savoirs produits par les féministes noires y souffrent d’invisibilité. La dénégation du racisme structurel impense la racialisation des questions sociales et la subalternisation des femmes racisées qui fonctionne sous couvert de doxa républicaine, relègue les groupes minorisés éloignés de la norme dominante dans la marginalité. Les féministes noires sont sous-représentées dans les dispositifs médiatiques et les rares prises de parole militantes sont peu audibles, dénigrées ou occultées, surtout lorsqu’elles se revendiquent afroféministes. Cette proposition s’inscrit dans l’axe 6 et consiste en une réflexion communicationnelle sur la manière dont les pensées féministes noires contemporaines existent et circulent. Nous nous intéressons aux voix des afroféministes françaises contemporaines et aux formes que prennent leurs discours. Nous analysons les dispositifs numériques dont ces locutrices s’emparent pour s’exprimer, faire circuler des savoirs et proposer des représentations audiovisuelles alternatives d’elles-mêmes par elles-mêmes, loin du féminisme blanc universaliste qui cherche à les subsumer. Nous avons travaillé à partir d’un corpus de 7 vidéos Youtube dans lesquelles s’expriment des militantes du collectif Mwasi, la réalisatrice Amandine Gay, les blogueuses engagées Mrs Roots, Kiyémis, Many chroniques, ou encore Keyholes & Snapshots. Ces vidéastes œuvrent à la structuration d’une lutte politique afroféministe française contemporaine qui serait « spécifique » tout en reprenant à leur compte différents héritages (black feminism, intersectionnalité, postcolonial studies). Elles soulignent les effets combinés du racisme et du sexisme qui forment le substrat des oppressions systémiques impensées. La visibilité publique des femmes noires militantes est au cœur d’un enjeu de pouvoir qui s’exerce au niveau de la question de savoir qui donne et qui reçoit la possibilité de (se) parler. Les types de dispositifs, les personnes, les modalités énonciatives et les genres de discours en présence relèvent d’une auto médiatisation militante singulière. La politisation est indentifiable dans les thèmes (patriarcat, race et racisme, mémoire de l’esclavage, impensé colonial, immigration, misogynoire) et dans l’engagement contre-hégémoniques qui consiste à se faire entendre en-deçà et au-delà des dispositifs médiatiques institués, dans un geste énonciatif de subjectivation politique collective qui vise l’émancipation.

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